lundi 8 juin 2020

La vraie nature de la crise

Quelle sera la durée de la crise que provoque le coronavirus ?

Christian Saint-Étienne a publié son pronostic sur Twitter :

« Avec PIB = 100 en 2019, PIB 2020 = 91, PIB 2021 = 95, PIB 2022 = 99 au mieux. Dette 2019 = 98 % du PIB, dette 2020 = 116 % du PIB, dette 2021 = 117 ou 118 % du PIB. Chômage catégorie A = 5 millions fin 2020. »

Il faudrait donc selon lui attendre 2022 pour que le PIB retrouve à peu près le niveau de 2019 et cela se ferait au prix d’une très forte augmentation de la dette de l’État.

Je trouve ce pronostic pessimiste (je m’en explique ci-dessous) et l’ai dit sur Twitter, mais d’autres personnes ont estimé au contraire que Saint-Étienne était trop optimiste.

« Trois ans pour revenir au régime antérieur ? », a ainsi écrit @HugoMe. « En 2008 ça a mis huit ans. »

Un dialogue s’est amorcé :

@michelvolle – « Une crise sanitaire n’est pas une crise économique, dont l’origine se trouve dans l’économie elle-même. »

@HugoMe – « Je ne comprends pas cette remarque. L’économie est durement touchée, des entreprises font faillite, des secteurs sont totalement ralentis. On ne sait même pas si ça va pas recommencer l’année prochaine. »

@michelvolle – « La crise est accidentelle, son ressort est extérieur à l’économie. On guérit plus vite d’une fracture que d’un cancer. »

@HugoMe – « On va dire aux chômeurs qu’ils sont pas vraiment au chômage. Que c’est une erreur. »

@michelvolle – « Une fracture, ça peut faire très mal. Mais il ne faut pas se tromper sur le diagnostic. »

*     *

La crise de 2008 était l’expression d’un mal qui rongeait l’économie : le risque excessif que portaient les prêts « subprimes », masqué par des produits financiers frauduleux que personne ne savait évaluer, avait contaminé tout le système financier. L’économie s’est alors effondrée comme le fait la santé d’une personne dont un cancer généralisé détruit le corps.

L’épidémie du coronavirus est par contre analogue à un accident dont on sort avec une fracture invalidante. Une fracture peut révéler des points faibles de notre vie : celui qui a besoin d’aide voit parfois s’éloigner des personnes qu’il avait cru amicales. De même, le coronavirus révèle des points faibles de notre société, de notre économie.

Mais il faut faire la différence entre une maladie intime, interne à l’économie qu’elle ronge, et les effets d’un choc extérieur. Le diagnostic n’étant pas le même, la prescription doit être différente.

*     *

Voici le scénario qui me semble le plus vraisemblable : une fois l’épidémie maîtrisée, la reprise surprendra les pessimistes mais elle sera inégale : le tourisme sera sans doute durablement déprimé ainsi que les activités qui en dépendent (luxe, hôtellerie, restauration).

Ce scénario peut être cependant contredit par les faits car notre économie est vulnérable aux errements de l’opinion : alors que nous aurions besoin d’une orientation constructive, des forces non négligeables se rassemblent pour se livrer un travail de démolition.

Une minorité remuante de la population, prenant l’écologie ou le social pour prétexte, s’est laissé séduire par l’esthétique du chaos, l’hostilité envers les institutions et les entreprises, le désir de « décroissance », l'opposition irréfléchie à tout « pouvoir » quel qu’il soit, et la plupart de nos « intellectuels » médiatiques lui emboîtent le pas.

C’est cela, le cancer dont souffre notre société, et il est beaucoup plus dangereux que le coronavirus.

2 commentaires:

  1. Merci Michel pour ton éclairage sur le diagnostic de la crise. J'espère être optimiste comme toi. Je pensais que les dettes des acteurs économiques montaient en flèche au niveau mondial et que la confiance allait s'écrouler avant le COVID. Le COVID est arrivé, les dettes continuent d'augmenter. Ne pousse-t-on pas le tas de sable en se remettant des dettes supplémentaires ? Certes elles soignent à court terme le mal présent (la fracture dont tu parles) mais quid du long terme ? Le redémarrage sera-t-il suffisamment puissant pour limiter la dépendance à la dette ? L'avenir nous le dira. Mais la crise des subprimes n'a pas réduit les dettes bien au contraire.Les Banques Centrales créent de plus en plus d'argent dans un circuit court état/Banque Centrale /Banques. J'espère que les entrepreneurs dont tu aimes valoriser les compétences, pourront trouver le moyen de fournir des produits/services utiles au monde malgré toutes les critiques qu'ils reçoivent !!

    RépondreSupprimer
  2. Le temps a passé depuis juin 2020. Nous savons maintenant que cette crise peut durer un certain nombre d'années. N'y aurait-il pas possibilité d'un effet d'interaction entre la durée de la crise sanitaire et le fonctionnement de l'économie qui mette à mal votre pronostic ? Que la cause externe engendre un mode de fonctionnement qui soit de nouveau intrinsèquement vicié comme le fut la crise de 2008 ?

    RépondreSupprimer