dimanche 24 octobre 2021

Voyage dans le monde de la pensée

La raison rationnelle procure à l’intellect et à l’action le schéma conceptuel et hypothétique, ou « modèle », d’un existant qu’elle perçoit hic et nunc.

Le « modèle en couches » de la communication étend la portée de la raison rationnelle en modélisant une suite de conditions nécessaires.

La « raison systémique » apporte une deuxième extension, les éléments d’un système étant reliés non par une suite séquentielle mais par un réseau de communications.

Le système qu’est un organisme vivant – être humain, institution, entreprise – dépend d’un réseau d’organes. Il comporte trop d’imprévisibles pour que la raison systémique puisse le penser.

La « raison raisonnable » embrasse la consistance physique de l’organisme et comble, fût-ce de façon imprécise, l’écart entre le schéma rationnel et la complexité du vivant. Elle lève les énigmes que présentent à la raison systémique le personnage de l’entrepreneur comme la personne de l’entreprise.

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La raison rationnelle

La nature, monde de ce qui « existe réellement et de fait », présente à la pensée et à l’action des êtres dont l’existence, perçue dans l’instant, n’a pas d’autre condition qu’elle-même. La logique développe un attribut essentiel de la nature : aucun être réel ne peut être autre que ce qu’il est. Poser simultanément deux affirmations dont l’une est le contraire de l’autre, c’est violer la nature car aucun être réel ou possible ne peut se contredire lui-même.

La logique est donc l’instrument qui permet de trier parmi les idées, pensées, images et phrases, celles qui peuvent correspondre à un être réel ou possible, et d’éliminer celles qui ne sont qu’un assemblage d’images ou de mots sans contenu.

Le langage abonde en ambiguïtés qui peuvent faire croire à la réalité d’une contradiction (on rencontre le mot « contradiction » chez Hegel mais il n’est pas aisé de dégager le sens qu’il lui attribue1). On peut dire ainsi qu’une route pentue « monte et descend à la fois », mais cela dépend du sens dans lequel on la parcourt ; un même être peut être ceci à un moment et cela à un autre moment, mais cela dépend du moment que l’on considère ; chacun est libre de vouloir à la fois une chose et son contraire, mais ces deux désirs ne pourront pas être satisfaits simultanément, etc.

La complexité de la nature est sans limite car il est impossible de décrire entièrement l’objet le plus banal et a fortiori la nature. Tout ce qui est logique est donc réel, car si ce n’était pas le cas la complexité de la nature aurait une limite.

samedi 16 octobre 2021

À propos du « plan France 2030 »

J'ai beau chercher, je ne vois ni le « numérique », ni l'informatique dans le plan France 2030. Or si je ne m'abuse le système productif s'appuie aujourd’hui essentiellement sur l'informatique : la mécanique, la chimie, l'énergie et la biologie progressent en effet désormais en s'informatisant, ainsi d'ailleurs que l'organisation des entreprises.

On bave d'admiration devant les GAFAM, mais que font ces entreprises ? De l'informatique ! Si on veut vraiment lutter contre le réchauffement climatique, il faut s'appuyer sur l'informatique car c'est elle qui fournit les moyens d'agir et de contrôler ce que l'on fait.

Mais un dirigeant n'en sait pas plus que les experts qu'il écoute, or que lui disent les experts ? Que l'informatique, c'est ringard, et que ce qui compte, c'est le climat, les retraites et les inégalités. Rien à redire à ces priorités, mais comment agir quand on ne s'appuie pas sur les moyens de l'action ? Si on les ignore ? Si on les méprise ?

Quand donc la mode cessera-t-elle de tourner le dos à l'informatisation ? de l'ignorer ? de ne voir que la superficie du phénomène, les « usages » quotidiens, alors que le système productif est transformé en profondeur ? Il est vrai que pour l'utilisateur, tout est simple (ou presque) : il lui suffit de cliquer ici ou là. Mais pour que l'utilisateur puisse jouir de cette simplicité, il a fallu construire des architectures diablement compliquées, et faire en sorte qu'elles soient solides et fiables.

Il faudra aussi qu'un jour les entreprises comprennent que la qualité de leur organisation dépend (1) de celle de leurs données, souvent négligée, (2) de celle de l'informatisation de leurs processus et donc (3) de celle de leur système d'information.

Ah si seulement les données avaient été nettoyées de tous les homonymes et synonymes qui les polluent… et si seulement les systèmes d'information étaient autre chose qu'un empilage d'outils hétéroclites, impossible à comprendre et à maîtriser… Mettre de l'ordre dans ces fatras, voilà qui serait une bonne priorité stratégique pour France 2030 !

Autre priorité stratégique : faire en sorte que la France se place parmi les pays les plus efficaces dans la production des circuits intégrés… Encore une priorité : former des ingénieurs compétents en programmation parallèle…

Je pourrais continuer cette liste des priorités véritables pour la France en 2030, j'en reste à ces quelques exemples. On peut avoir plein de priorités judicieuses, mais il en est une plus importante : celle qui permet d'agir, et sans laquelle tout ce que l'on peut vouloir faire aboutira à l'échec.

Or ce qui permet d'agir aujourd'hui pour l'énergie, la mécanique, la chimie, la biologie, etc., c'est l'informatisation et l'alignement des valeurs de l'entreprise sur l'efficacité de la production, la qualité des produits, la satisfaction des clients, car en effet ce sont là les critères d'une informatisation réussie des processus de production.

Quand comprendra-t-on que l'informatisation est un phénomène anthropologique complet, qui transforme tout et qui conditionne tout ? Quand cessera-t-on de répéter des niaiseries à la mode ? Quand sera-t-on, enfin, sérieux devant la situation présente ?

 

vendredi 15 octobre 2021

Un bilan

Avec l’accumulation des années le corps se déglingue et l’échéance de la mort approche. Elle ne me semble pas effrayante, je la trouve même désirable à certains égards.

Cela m’invite à méditer et faire un bilan : ce que j’ai fait, ce que j’ai été. Je condense ici le résultat.

J’ai fait souffrir des personnes par indifférence, sottise ou méchanceté. Comme je le regrette ! L’action étant malheureusement irréversible, ce que j’ai fait a été fait. J’en porte la responsabilité.

J’ai souffert moi aussi. Seule la mort pouvant effacer ces souvenirs pénibles, je voudrais par moments qu’elle vînt plus vite.

Mon intelligence a d’étroites limites même si je m’efforce à garder les yeux ouverts : je suis souvent borné et buté comme un âne. Partout où je suis passé – et j’ai souvent changé d’endroit – j’ai cependant fait ce qui me semblait être mon devoir. Même si l’on peine parfois à trouver un chemin cette boussole indique une orientation droite. Mon inflexibilité a pu être incommode mais je crois que c’est la seule attitude qui puisse être féconde à la longue.

J’ai voulu ne pas faire carrière, j’ai soigneusement évité les pièges de la célébrité, sur ces deux points j’ai parfaitement réussi. Cela a sans doute réduit l’audience de mon travail mais il a pu rester sans complaisance. Quelques personnes disent qu’il leur est utile et cela me suffit.

Je ne suis pas de ceux qui ruminent les exemples de perversité et de médiocrité que donne notre espèce car ils me semblent plus que compensés par l’éclat lumineux des personnes généreuses que j’ai rencontrées parmi mes professeurs, mes collègues, mes collaborateurs, ainsi que parmi les commerçants et les artisans.

J’aurai été aimé bien plus que je ne le mérite et lorsque je serai mort la vie continuera avec tout ce que j’aime : les jeux des enfants, la beauté des femmes, le déploiement des nuages, le jaillissement toujours renouvelé de la nature, la noble générosité de certains êtres, l’élégance efficace de certaines œuvres. Penser cela me procure une joie profonde.