L’origine de l’IA se trouve dans un article publié par Alan Turing en 19501, où il définit un test qui permettrait de dire qu’il n’existe pas de différence entre l’intelligence humaine et celle de l’ordinateur2.
Ce test qui s’appuie sur le « jeu de l’imitation » sera réussi, dit-il, si lors d’un exercice de cinq minutes l’interrogateur aura confondu l’ordinateur avec un être humain dans au moins 30 % des cas. On peut évidemment estimer, contrairement à Turing, qu'il serait hardi de déduire d'un tel test que l'ordinateur est « intelligent ».
Dans le même article Turing explique d'ailleurs ce qu’est un ordinateur :
« On peut expliquer l'idée qui se trouve derrière les ordinateurs en disant qu'ils sont conçus pour réaliser toutes les opérations qui pourraient être faites par un calculateur humain. Le calculateur humain est supposé suivre des règles fixes ; il n'a pas le droit de s'en écarter le moins du monde. Nous pouvons supposer que ces règles lui sont fournies dans un livre qui sera modifié chaque fois qu'on veut lui faire faire un nouveau travail. »
L’ordinateur est donc essentiellement un automate programmable, fait pour exécuter tout ce qui peut être programmé. Son « intelligence » est une « intelligence à effet différé » stockée dans ses programmes, tout comme un « travail à effet différé » (ou « travail mort ») est stocké dans le capital fixe d’une entreprise en l’attente du « travail à effet immédiat » (ou « travail vivant ») des agents opérationnels.
Si l’ordinateur reçoit de son environnement les signaux qui déclenchent le programme celui-ci sera exécuté, grâce à la puissance de son processeur, avec une vitesse dont un calculateur humain serait incapable : il peut sembler accomplir alors certaines des promesses de la magie.
L’extension ainsi apportée à l’action potentielle est cependant limitée car l’ordinateur ne peut qu’exécuter son programme : il ne possède pas le « bon sens » qui permet à un être humain d’interpréter un imprévu, de s’adapter à une situation nouvelle, etc.
« L'ordinateur et l'homme sont les deux opposés les plus intégraux qui existent. L'homme est lent, peu rigoureux et très intuitif. L'ordinateur est super rapide, très rigoureux et complètement con. »Turing en était conscient. Dans son dernier article3 il a évoqué « the inadequacy of "reason" unsupported by common sense », expression dont nous devrons sonder la profondeur.
(Gérard Berry, entretien avec Rue 89, 26 août 2016.)
Episode suivant : Les hivers des deux premières IA
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1 Alan Turing, « Computing machinery and intelligence », Mind, 1950.
2 Le mot « ordinateur » a été créé en 1955 par le linguiste Jacques Perret à la demande d’IBM qui voulait traduire « computer » en français en évitant « calculateur », jugé mauvais pour l’image de ses machines.
3 Alan Turing, « Solvable and Unsolvable Problems », Science News, 1954.
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1 Alan Turing, « Computing machinery and intelligence », Mind, 1950.
2 Le mot « ordinateur » a été créé en 1955 par le linguiste Jacques Perret à la demande d’IBM qui voulait traduire « computer » en français en évitant « calculateur », jugé mauvais pour l’image de ses machines.
3 Alan Turing, « Solvable and Unsolvable Problems », Science News, 1954.
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