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Le redressement productif est donc à l’ordre du jour. Et il y a urgence au vu de la vitesse à laquelle dépérit notre industrie et du caractère abyssal du déficit de la balance commerciale.
Le redressement suppose celui de la compétitivité de notre tissu économique. Pour beaucoup (notamment les représentants du patronat), la question de la compétitivité semble se réduire à celle du coût du travail. Cette conception éculée de la compétitivité nous fait collectivement courir le risque de rater le virage historique de l’entrée dans le nouvel âge de l’économie consistant dans le passage d’un capitalisme industriel à un capitalisme immatériel s’appuyant sur un système technique centré sur l’informatique.
Mobiliser l’intelligence collective
La création de valeur découle de moins en moins de l’efficacité et du coût de la transformation de la matière. Elle réside aujourd’hui dans la capacité de mobilisation de ressources immatérielles en vue de la fourniture d’effets utiles. Expliquons-nous.
Pour les entreprises, la voie royale pour se soustraire aux effets dévastateurs de l’hyper-concurrence sur les marchés mondialisés réside dans la capacité d’innovation permanente.
Mais être mesure de renouveler à rythme rapide l’offre, de la doter d’éléments exclusifs valorisés par les clients et difficilement imitables par les concurrents, impose des modes spécifiques d’organisation des entreprises.
Il ne s’agit plus de mobiliser la « main-d’œuvre » dans les meilleures conditions de coûts, mais de mobiliser le « cerveau-d’œuvre », c’est-à-dire la ressource immatérielle que constituent les capacités créatrices des individus.
Cela suppose pour les entreprises de réviser l’organisation au profit de plus d’horizontalité et de davantage de sens donné au travail, de mettre les intelligences en réseau à l’intérieur de l’entreprise mais aussi en jetant des ponts vers l’extérieur afin de capter les formidables ressources cognitives que recèle l’environnement par des relations partenariales avec les fournisseurs, la coopération avec la recherche publique, la mobilisation de l’intelligence collective (open data, crowdsourcing etc.).
Une économie des effets utiles
Le développement de cette capacité créative ne doit pas seulement viser l’élaboration de produits innovants. Il doit nourrir la mise en œuvre de nouveaux modèles économiques de nature servicielle.
Les clients ne recherchent jamais des produits pour eux-mêmes mais pour les effets utiles attendus de leur usage, pour leur capacité à les aider à résoudre des problèmes.
Délivrer des solutions suppose de bâtir des offres autour de bouquets de biens et de services complémentaires dans l’usage, dont la valeur ajoutée réside dans la pertinence de la composition et la qualité de l’intégration.
Fournir des effets utiles et offrir des solutions implique également de faire évoluer la relation marchande d’une polarisation sur la transaction vers une relation personnalisée, dense et qui s’inscrit dans la durée, siège d’une coproduction avec le client.
De grandes entreprises comme IBM ont compris depuis longtemps tout le bénéfice qu’elles pouvaient tirer de ce basculement du produit vers le service.
Ces modèles économiques serviciels ne sont pas seulement un formidable levier de création de valeur pour les entreprises. Sous certaines conditions, ils peuvent être un moyen de concilier, par la dématérialisation de la production de la valeur, la croissance de l’activité économique avec le développement durable, qui constituera l’enjeu majeur du XXIe siècle.
De la quantité à la qualité : changer de logique
Déplacer le centre de gravité de l’activité économique de la production et de la vente de biens à la fourniture d’effets utiles et de solutions - autrement dit des moyens vers les fins - fait sortir le processus de création de valeur d’une logique quantitative (la maximisation du nombre de produits vendus) à une logique qualitative conduisant à l’internalisation de l’économie de matière au cœur même des modèles de rentabilité.
Mettre la capacité d’innovation permanente au service de modèles économiques serviciels, voilà donc l’enjeu d’une approche renouvelée de la compétitivité. La question du coût du travail perd subitement sa pertinence, alors que celle du développement des capacités créatrices et relationnelles s’impose comme nouveau fondement de la compétitivité.
L’éducation, la formation professionnelle tout au long de la vie, la recherche et plus généralement la culture, sont alors des axes majeurs d’une politique industrielle qui doit aussi chercher à accélérer la diffusion du numérique à tous les niveaux. Car les technologies du numérique sont au cœur du fonctionnement de cette économie de l’immatériel pour mettre en réseau les intelligences, fournir les plates-formes permettant de délivrer les solutions et... économiser la main-d’œuvre dans les tâches répétitives peu créatrices de valeur.
Nous ne restaurerons par notre compétitivité en tentant de faire renaître l’industrie d’hier. Notre capacité de rebond passe par notre aptitude à participer à l’émergence d’une nouvelle organisation des activités économiques qui mette l’homme au cœur, à la fois comme ressource et comme finalité. Bref, négocier le passage de l’économie à l’iconomie. I pour intelligence, informatique, service et, finalement, pour immatériel.
Quelles système de réumnération avec l'iconomie ?
RépondreSupprimerLe revenu de base (ou autres "dotation inconditionnelle d'autonomie" ,"Allocation universelle") ?
http://www.tetedequenelle.fr/2012/06/parti-pirate-revenu-de-base/
Comme toute économie parvenue à l'équilibre, l'iconomie connaîtra le plein emploi : le chômage est un symptôme de déséquilibre.
SupprimerL'équilibre implique l'adéquation des compétences des agents opérationnels, de l'organisation des entreprises, des habitudes des consommateurs etc.
La transition vers l'équilibre de l'iconomie risque d'être longue, pénible, et nécessitera sans doute une redistribution des revenus.