mercredi 7 décembre 2011

Les télécoms dans les Hautes Cévennes

Je reproduis ci-dessous le compte rendu de l'assemblée générale de l'association « Allô, où sommes-nous » le 22 octobre : il montre où en sont les services télécoms dans une zone à faible densité de population.

*     *

Les services télécoms dans les Hautes-Cévennes sont diversifiés :
- téléphonie filaire, « service universel » offert par l'opérateur historique, France Telecom ;
- téléphonie mobile ;
- accès à l'Internet :
  - via le réseau téléphonique filaire selon la technique ADSL ;
  - par satellite ;
  - via le réseau hertzien offert par Meshnet.

Le tour d'horizon a apporté les informations suivantes.
1) Téléphonie filaire : le service est de très mauvaise qualité. Les pannes sont fréquentes et parfois longues (plusieurs semaines) et sur certaines lignes le signal vocal est inaudible.
France Telecom ne respecte donc pas dans les Hautes-Cévennes ses obligations concernant le « service universel », mais lorsque ses clients se plaignent ils reçoivent des réponses orales ou même écrites mensongères (« vous êtes le seul qui se plaigne ») et désinvoltes (« vous n'avez qu'à prendre un téléphone mobile »).
Les sous-traitants qui assurent la maintenance du réseau disent « les lignes sont pourries, votre maire ne fait pas le nécessaire auprès de France Telecom ». Pourtant les maires ont émis des réclamations, mais ils ont reçu le même type de réponse que les clients.
Beaucoup de personnes se désabonnent de France Telecom. D'autres conservent leur ligne par civisme, et malgré leur insatisfaction, afin que le réseau soit maintenu en état de marche et puisse servir aux personnes qui n'ont pas les moyens de payer un service de meilleure qualité.
Conclusion : Il faut obtenir que France Telecom mette le réseau à niveau. Renseignement pris, la fibre optique ne coûterait pas plus cher que les lignes en cuivre : elle peut être installée en aérien car les poteaux existants ne sont pas surchargés, et contrairement au cuivre elle n'intéresse pas les voleurs.
Cette réfection permettrait l'accès à l'Internet avec des débits comparables à ceux qui sont offerts en ville (jusqu'à quelques dizaines de Mbit/s) et résoudrait donc une partie des problèmes mentionnés ci-dessous.
2) Téléphonie mobile : les zones blanches sont nombreuses dans les Hautes-Cévennes. Il est impossible de recevoir le signal d'Orange au centre de Génolhac  : les opérateurs ne partageant pas leurs antennes, il faudrait avoir trois abonnements simultanés pour disposer d'un service acceptable.
Les services 3G ou 3G+, qui permettent d'accéder à l'Internet à partir d'un téléphone mobile, sont pratiquement inexistants comparés aux zones urbaines. Qu'en sera-t-il dans le futur pour le service 4G, qui fournira le haut débit mobile ?
Conclusion : nous demanderons à l'ARCEP de faire en sorte que les opérateurs de téléphonie mobile partagent leurs antennes dans les Hautes-Cévennes, et que le service 3G y soit effectivement disponible.
3) Accès à l'Internet selon la technique ADSL : ce service n'est offert qu'aux clients distants de moins de 6 km des équipements de France Telecom : il n'est pas donc disponible dans la plupart des hameaux. Comme il emprunte le réseau de téléphonie filaire, il est sujet aux mêmes pannes que lui.
Conclusion : cette technique ne représente pas une solution durable pour les Hautes-Cévennes car elle n'offre qu'un débit de quelques Mbit/s au plus et sa portée géographique est trop limitée.
4) Accès à l'Internet par satellite : Nordnet, filiale de France Telecom, offre un accès qui peut aller jusqu'à 4 Mbit/s mais dont le volume mensuel est limité (4 Goctets au plus) : ce service ne convient donc pas aux clients qui veulent pouvoir télécharger de gros volumes.
Nordnet n'offre pas le service téléphonique sur satellite.
Le signal peut être interrompu en cas d'orage ou de forte pluie, et aussi (contrairement au réseau téléphonique filaire) en cas de panne du réseau EDF, relativement fréquente dans certains hameaux.
Conclusion : ce service ne peut être utile que pour les clients qui ne disposent pas d'une autre solution.
5) Accès à l'Internet via Meshnet : Meshnet offre jusqu'à 4 Mbit/s en débit descendant. Meshnet a cependant promis, lors des réunions qui ont précédé le lancement du service, que le débit offert pourrait par la suite être augmenté à tarif constant.
La couverture du territoire n'est pas complète : certains hameaux ne peuvent pas être desservis par Meshnet (La Boissière, commune de Malons), d'autres le sont mal (débit irrégulier aux Allègres, commune de Bonnevaux).
Le débit constaté en utilisant speedtest.net est souvent inférieur au débit qui figure sur le contrat (sans engagement, il est vrai). Il se peut que le débit soit ralenti par le routeur du réseau local : il est conseillé de mesurer le débit en connectant directement l'ordinateur à l'antenne Meshnet.
Les pannes sont moins fréquentes que sur le réseau téléphonique filaire, mais il s'en produit quand même. L'accueil téléphonique est efficace et le dépannage est relativement rapide, sauf si la panne se produit pendant le week-end car alors il faut attendre jusqu'au lundi.
Comme avec le satellite, le service est interrompu en cas de panne du réseau EDF.
Le service téléphonique offert sur cet accès est de bonne qualité quand le réseau n'est pas en panne. Il est offert par Meshnet pour 15 €/mois, par Nostre Païs pour 5,10 €/mois. On peut aussi utiliser le service qu'offre OVH (www.ovh.com) et qui ne coûte que 1,18 €/mois ! Il est difficile de comprendre ces différences, mais chacun doit faire le meilleur choix en examinant le détail de l'offre (notamment les tarifs hors forfait).
Conclusion : Il faut demander au pays Cévennes de réviser le contrat, de sorte que le service (accueil téléphonique et dépannage) soit assuré 7 jours sur 7. Il faudrait que des parafoudres et des réenclencheurs automatiques soient installés sur les pylônes de Meshnet, cela réduirait la durée des pannes.

Conclusion générale : Chacun est invité à prendre conscience des dépenses du ménage en télécoms (téléphonie filaire, téléphonie mobile, accès à l'Internet) et en télévision par satellite. On découvrira que le budget annuel atteint facilement 2 000 €/an !
L'Internet n'est plus un luxe aujourd'hui : c'est devenu un besoin, car il est de plus en plus utilisé pour les démarches administratives et le commerce. Il faut éviter que les Hautes-Cévennes ne deviennent une zone où certaines personnes ne pourraient plus habiter parce que l'Internet et l'alimentation en électricité y sont de trop mauvaise qualité par rapport à la ville.

Actions à entreprendre : Le présent compte-rendu sera diffusé auprès des membres de l'association, des mairies des Hautes-Cévennes et de la Communauté des Communes.
Michel Volle et Robert Vijgenboom rencontreront M. Moïse Senn, du Pays Cévennes, pour faire le point avec lui sur les relations avec Meshnet.
Michel Volle et Philippe Baehr rencontreront la personne qui est responsable des services télécoms à la région pour faire le point sur les relations avec France Telecom.
Michel Volle demandera à l'ARCEP de faire en sorte que les antennes de téléphonie mobile soient partagées entre les opérateurs et que le service 3G soit effectivement disponible.

Composition du bureau : Michel Volle est reconduit dans les fonctions de président de l'association et Philippe Baehr dans celles de trésorier.

Complément d'information : suite à la diffusion de ce compte rendu, nous avons reçu de Mme Roseline Boussac, maire de Bonnevaux, les remarques suivantes sur le paragraphe "Accès à l'Internet par satellite" :
Pour les gros volumes, je ne conteste pas, mais Nordnet offre un service téléphonique. Il y a très peu d'interruption sinon jamais (aucun problème dû au vent, à l'orage ou à la pluie). Nous avons Nordnet depuis près de cinq ans. Combien de fois cela marche chez moi et en arrivant à la Mairie (de Bonnevaux), Meshnet est en panne. D'autre part pour un prix de 70 euros environ nous avons accès à la télévision par satellite ASTRA ainsi qu'à toutes les fréquences FM. Habitant dans un creux très creux, nous avons ce système depuis plusieurs années en direct.

4 commentaires:

  1. Votre texte m'inspire une question difficile à formuler.
    La localisation physique ne suffit pas à caractériser le "je suis ici" dans le monde d'aujourdhui.
    si j'éteins mon smartphone suis je toujours au même endroit? si mon fournisseur coupe les accès suis je toujours au même endroit ? si je peux seulement téléphoner sans accès données suis je plus loin ?
    je manque d'outils de pensée pertinents sur la localisation dans monde contemporain mixte physique et réseaux;
    connaissez vous des référentiels ?
    En vous remerciant de la qualité de vos articles et du fléchage pertinent de vos tweets
    Frédéric Rousseau : e2pi31@gmail.com

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  2. @bado
    Oui, les réseaux créent un nouvel espace où la distance n'est plus celle de la géographie mais celle de l'accès. On y trouve, sous une forme différente, des choses qui sont analogues aux routes, sentiers, portes et serrures.
    "Explorer l'espace logique" fournit quelques éléments de réponse à vos questions.

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  3. J'ai assisté le 25 novembre dernier à une série de débats autour de la citoyenneté et du numérique. Le premier de ces débats abordait la fracture numérique.
    Les représentants des opérateurs présents (France Télécom et Free) ont dit en substance "patience, patience, cela demandera 20 ans de déployer le THD, et encore pas partout", alors que les représentants des collectivités locales eux ruaient dans les brancards si j'ose dire car ils ne peuvent attendre d'avoir, sans même parler du THD, au moins du 4Mb partout.
    Dialogue de sourds.
    Mais a priori les opérateurs ont un boulevard devant eux, tout tracé par l'ARCEP : pas de réelle obligation de couvrir les zones non rentables, les collectivités locales qui le voudraient et le pourraient ne peuvent s'engager par elles-mêmes dans la mise en place d'une couverture THD qui se ferait en dehors des opérateurs FT, Free ou SFR.
    Pour plus de détails voir le CR de ces débats ici : http://jcgarnier.wordpress.com/2011/11/25/citoyennete-et-numerique/

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  4. Malheureusement, le constat apporté est édifiant et bien malheureux !
    Après, je dois dire que pour un novice des Télécoms, c'est-à-dire ne travaillant que depuis un peu plus de 5 ans pour un opérateur, les solutions proposées sont somme toute raisonnables et la dépense annuelle moyenne est juste !
    Maintenant, comme le dit jcgarnier, les Hautes Cévennes ne sont pas une priorité absolue et ceci quel que soit l'opérateur !
    La priorité des trois opérateurs mobiles actuels est plus de savoir quelles sont les offres que va proposer Free Mobile !
    La seule chose que je peux dire ici et qu'il est bien lamentable que le territoire ne soit pas entièrement couvert et que certaines demandes bien que légitimes et loin 'être récentes restent "lettre morte".
    Bon courage Michel !!! Et n'abandonnes pas (mais bon là, je ne suis pas inquiet) !

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