mardi 28 juillet 2020

Melanie Mitchell, Artificial Intelligence: A Guide for Thinking Humans, Farrar, Straus and Giroux, 2019

J'ai lu ce livre avec plaisir. L'auteur est compétente, modeste, lucide, elle a de l'humour, les exemples qu'elle décrit sont une mine d'informations.

Contrairement aux essayistes qui cèdent à la mode du « hype » ou qui, au contraire, considèrent l’IA à travers les lunettes que fournit une philosophie hors de saison, elle sait de quoi elle parle parce qu'elle en a acquis en tant que chercheur une expérience pratique et professionnelle.

Les épisodes historiques de l’IA sont décrits de façon précise avec leurs avancées et leurs limites : systèmes experts, machines à vecteurs de support, réseaux neuronaux. Certaines réussites sont impressionnantes (victoires contre les champions du monde aux échecs et au jeu de Go, reconnaissance d’images), mais l’IA qui sait jouer aux échecs ne sait rien faire d’autre : elle est étroitement limitée et il en est de même pour toutes les autres applications.

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J’ai, comme Melanie Mitchell mais sans avoir son expérience, de fortes convictions concernant l'IA. La lire m'a incité à m'interroger sur ma propre expérience.

Mes convictions viennent de la pratique de la statistique. J'ai conçu, réalisé, exploité des enquêtes puis publié leurs résultats. J'ai pratiqué l'analyse des données et étudié à fond l'état de l'art de ses techniques dans les années 60-80.

Dans l'un et l'autre cas, j'ai rencontré des limites et tenté de les comprendre : comment et dans quel but est définie la grille conceptuelle d’une observation statistique ? Comment interpréter les résultats d'une analyse des données ?

La première question m'a conduit vers l'histoire, la deuxième vers la science économique. Cela m'a préparé aux systèmes d'information que j'ai rencontrés dans les années 90.

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Les questions que soulève Melanie Mitchell concernent en fait l'informatique dont l'IA n'est qu'une application parmi d'autres. La question fondamentale est celle que George Forsythe a posée en 1969 : « “What can be automated?” is one of the most inspiring philosophical and practical questions of contemporary civilization ».

vendredi 24 juillet 2020

Éviter la faillite

L'informatisation a transformé le système productif, l'économie et la société. Le monde sera dominé par les pays qui auront su maîtriser l'informatique. Ne parler que de "numérique" et d'"intelligence artificielle" n'aide vraiment pas à concevoir la stratégie qui répond à ce phénomène.

Dans sa déclaration d'intention le Premier ministre a indiqué au Parlement les priorités de son gouvernement : l'environnement, le social et l'emploi.

Nous serons donc verts et pauvres, comme le veulent les écologistes épris de décroissance. Le social distribuera équitablement notre pauvreté. Dans nos entreprises obsolètes l'emploi sera soutenu par des subventions.

Ainsi nous aurons atteint la Vertu que prêchait Rousseau et dont Mao a donné un exemple : nous aurons eu du moins, foutu pour foutu, la satisfaction de mourir dans l'honneur.

L'institut de l'iconomie propose une autre orientation : concevoir les possibilités comme les dangers qu'apporte l'informatique, respecter les conditions nécessaires de l'efficacité dans la situation présente.

L’État pourrait donner l'exemple en s'occupant enfin sérieusement de l'informatisation des grands systèmes de la nation : santé, justice, éducation, défense, etc.